Business Joomla Themes by Justhost Reviews

Défendre l’école publique contre toutes les attaques qui visent à la détruire

Catégorie : Non catégorisé
Création : jeudi 21 avril 2022 Mis à jour : jeudi 21 avril 2022 Publication : jeudi 21 avril 2022
Écrit par Super User
Etoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactives


Défendre l'école publique contre toutes les attaques qui visent à la détruire

Tribune collective : Collectif Aggiornamento Histoire-Géo - Collectif Questions de classe(s) - N'Autre école - Collectif pour la défense du service public d'éducation 38 - ICEM Pédagogie Freinet - GFEN - Institut bell hooks/Paulo Freire - Collectif Pédagogie Solidaire - collectif Lettres vives - collectif SVT Égalité - collectif Enseignant·e·s Pour La Planète - Cahiers de pédagogie radicale - Fondation Copernic - L'APSES (association des professeurs de sciences économiques et sociales) -Cahiers d'histoire, revue d'histoire critique - FCPE 75 - GRDS (Groupe de recherche sur la démocratisation scolaire) - ATTAC - AFEF (association française des enseignants de français) - OCCE (office central de la coopération à l'école) - Comité thématique Éducation de Génération.s - CRAP-cahiers pédagogiques - Revue Carnets rouges - Commission éducation du PRCF - CVUH (Comité de vigilance face aux usages publics de l’histoire)

Publication initiale : 17/11/2021

Ce 12 novembre 2021, le Figaro Magazine a titré sa une ” École. Comment on endoctrine nos enfants”. Le sous-titre est encore plus racoleur : “Antiracisme, idéologie LGBT+, décolonialisme… Enquête sur une dérive bien organisée”. À l’heure où le ministère de l’Éducation nationale clame la nécessité de « revenir » aux valeurs de la république, cet article dénonce des enseignant ·e s qui les mettent en œuvre !

La charge se fait par l’intermédiaire de témoignages anonymes. La dénonciation en particulier d’une enseignante d’EMC à partir des déclarations d’une élève n’a rien à envier aux méthodes qui ont conduit à la décapitation de notre collègue Samuel Paty : le mensonge, la calomnie, la dénonciation publique d’ enseignant·es.

Le vocabulaire employé relève d’un complotisme qu’on s’étonne de trouver dans un magazine lancé d’un quotidien national. De quel côté se situe l’endoctrinement ? Faudrait-il donc sanctionner des enseignant·es qui luttent contre toutes les discriminations et les préjugés qui mènent à la violence ?

Hier, ils dénigraient l’Université publique en taxant les universitaires d’Islamo-gauchistes. Aujourd’hui, c’est au tour de l’École publique et de toute la profession enseignante, sans égards pour les attaques dont elle souffre depuis de nombreuses années.

Cet article est une caricature outrancière. Il est l’illustration et le résultat de l’abandon d’un service public d’éducation depuis trop d’années. Au lieu de parler des moyens, à l’heure où le ministère de l’Éducation nationale rend pour la troisième fois en deux ans des dizaines de millions d’euros à Bercy tandis que l’école publique implose, on préfère lancer des anathèmes et discréditer une institution dans son ensemble. Un cap dans la stratégie de délégitimation de l’école publique vient d’être franchi. Il ne s’agit plus seulement de détruire, il faut maintenant salir.

Trop c’est trop !

Depuis trop d’années, l’école est la cible d’attaques organisées si bien que le prof-bashing est devenu un sport national, désormais alimenté par le ministère. La réalité des salles de classes, des cours de récréation et des établissements scolaires, où le savoir se construit avec un recul critique, n’est lue nulle part, entendue nulle part. Au lieu de cela, ce sont les commentateurs et commentatrices les plus éloigné·es de la sphère scolaire qui font naître des peurs et de véritables paniques morales plaquées sur une école qui n’existe que dans leurs fantasmes. Nous ne sommes pas responsables des comptes qu’ils ont à régler avec l’institution scolaire.

Ici, un nouveau pas est franchi, puisque depuis la publication du dossier et le tollé qu’il a suscité, par son silence, Jean-Michel Blanquer lui apporte sa caution. Du titre aux articles, le torrent de boue déversé, les accusations infondées, auraient pourtant mérité réaction d’autant plus que certaines “valeurs de la République” y sont malmenées, tel l’antiracisme ou la lutte contre les LGBT+-phobies qui s’inscrivent bien, aux dernières nouvelles, dans le principe de fraternité. Pire, par la voix de Souâd Ayada, présidente du Conseil Supérieur des Programmes, on peut lire une caution de la rue de Grenelle à des propos pourtant faiblement étayés. Elle va jusqu’à souhaiter contrôler et épurer l’édition scolaire, pratique qui masque mal un désir inassouvi de censure de certains débats.

Ajoutons que ce dossier opère une opportune diversion et sert les intérêts d’un ministère désormais incapable d’assurer à tous les enfants de la République des conditions d’accueil scolaire conformes au code de l’éducation. Le manque d’enseignantes et d’enseignants est criant dans certaines académies, et prive des enfants toujours plus nombreux de leur droit essentiel à l’éducation. Quant à l’intégration des élèves en situation de handicap, elle est d’une insuffisance au-delà du scandale. Devant cette rupture majeure du principe d’égalité, largement dénoncée, le silence est pourtant de mise dans les Rectorats concernés comme rue de Grenelle.

Les collectifs signataires de cette tribune dénoncent, sans réserve, ces attaques infondées. L’école publique n’endoctrine personne. Au contraire, chaque jour, des centaines de milliers d’enseignant·es œuvrent pour que chaque élève, chaque enfant, chaque jeune puisse apprendre, progresser, grandir et former son jugement, loin du spectaculaire médiatique et des fake-news. Qu’ils et elles soient ici remercié·es et félicité·es, pour ce labeur quotidien, le plus souvent exercé dans l’ombre de ces coups médiatiques scandaleux et dangereux, faisant le lit de l’extrême-droitisation des discours sur l’école. Ça suffit !

La profession enseignante, à plusieurs reprises endeuillée et meurtrie ces derniers mois, a droit à un peu de reconnaissance et de tranquillité. Que ses ennemis récurrents le lui accordent, est-ce trop demander ?

Au court terme des échéances électorales et des discours caricaturaux répond le temps long de l’éducation. Nous en appelons dès lors à ce que l’école soit protégée de ces attaques. Nous adressons notre plus entière solidarité aux collègues et collectifs nommément visés dans le dossier du Figaro Magazine. Sans faire fi de notre diversité, nous exprimons avec force et clarté notre attachement au service public d’éducation nationale. Puissions-nous collectivement trouver le courage nécessaire à la continuation de notre métier car nos élèves, nos enfants, en ont besoin et se tiennent fort heureusement loin du monde ténébreux dessiné par le Figaro Magazine.

Signataires : Collectif Aggiornamento Histoire-Géo Collectif Questions de classe(s) – N’Autre école Collectif pour la défense du service public d’éducation 38 ICEM Pédagogie Freinet GFEN Institut bell hooks/Paulo Freire Collectif Pédagogie Solidaire collectif Lettres vives collectif SVT Égalité collectif Enseignant·e·s Pour La Planète Cahiers de pédagogie radicale Fondation Copernic L’APSES (association des professeurs de sciences économiques et sociales) Cahiers d’histoire, revue d’histoire critique GRDS (Groupe de recherche sur la démocratisation scolaire) ATTAC AFEF (association française des enseignants de français) OCCE (office central de la coopération à l’école) Comité thématique Education de Génération.s CRAP-Cahiers pédagogiques Revue Carnets rouges Commission éducation du PRCF CVUH (comité de vigilance face aux usages publics de l’histoire)

Pour un troisième tour social et pédagogique ! Appel collectif

Catégorie : Non catégorisé
Création : mercredi 20 avril 2022 Mis à jour : mercredi 20 avril 2022 Publication : mercredi 20 avril 2022
Écrit par Super User
Etoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactives

Pour un troisième tour social et pédagogique ! Appel collectif

Texte des collectifs et mouvements : Aggiornamento histoire-géo, Enseignant·es pour la planète, Icem – Pédagogie Freinet, Iresmo, Questions de classe(s) – N’Autre école, Lettres vives, SVT Égalité.
Publication initiale : 20/04/2022

Une nouvelle fois, l’élection présidentielle nous offre le détestable spectacle d’un deuxième tour opposant la droite néolibérale autoritaire et l’extrême droite.

En matière d’éducation, le choix se résume entre l’école au pas ou l’école en marche et en marché. Il est clair que ni Macron ni Le Pen ne sont des solutions à la situation à laquelle nous, personnels de l’éducation, sommes confronté·es.

Pour autant, nous ne sommes pas de celles et ceux qui tracent un signe égal entre les deux candidat·es. Syndicalistes, pédagogues, militant·es antifascistes, écologistes, défenseur·euses des droits des femmes et des personnes LGBTQI+, des musulman·es, des étrangèr·es, des sans papièr·es et des réfugié·es, nous connaissons trop bien les conséquences immédiates et terribles qu’aurait l’accession de l’extrême droite au pouvoir, avec, à sa botte, la police, l’armée, la justice, la hiérarchie de l’Éducation nationale, etc.

Notre histoire nous enseigne combien, de Paul Robin à Célestin Freinet, en passant par Francisco Ferrer, les enseignant·es des centres sociaux d’Algérie jusqu’à nos six camarades réprimé·es de l’école Pasteur à Saint-Denis, l’école est toujours en première ligne pour subir les attaques et les violences de l’extrême droite.

À celles et ceux qui déclarent « on n’a jamais essayé », nous voulons rappeler ce qui se passe aujourd’hui dans le Brésil de Bolsonaro, la Hongrie d’Orban, la Turquie d’Erdogan, la Russie de Poutine, etc. Et puisque la campagne présidentielle a servi de marchepied aux nostalgiques de Vichy, rappelons aussi ce que fut la politique éducative du Maréchal Pétain. Avant même de prendre les mesures que l’on sait contre les communistes, les francs-maçon·nes, les gens du voyage, les homosexuel·les et les Juif·ves, c’est au redressement de l’école et à la purge des instituteur·trices que le régime de Vichy consacre ses premières résolutions. En moins de quatre mois, les principales contre-réformes scolaires sont promulguées : suspension des conseils et comités consultatifs (loi du 12 juillet), remplacement du recrutement par concours des inspecteurs par une nomination (loi du 2 août), rétablissement de l’enseignement congréganiste (loi du 3 septembre), suppression des écoles normales d’instituteurs, ces « séminaires malfaisants de la démocratie » (loi du 18 septembre), exclusion des Juif·ves des emplois universitaires dans le cadre du « statut des Juifs » (loi du 3 octobre), dissolution des syndicats et associations professionnelles de fonctionnaires (loi du 15 octobre) et, enfin, introduction de l’enseignement des devoirs envers Dieu dans les programmes des écoles primaires (loi du 23 octobre). Suivront l’introduction de l’enseignement religieux comme option et la parité de subvention entre le public et le privé (loi du 6 janvier 1941), puis la fin de la gratuité de l’enseignement secondaire (loi et décret du 15 août 1941).

Ces vingt dernières années, ce sont les droits des personnes musulmanes (dont des élèves, étudiant·es et parents d’élèves) qui sont ciblés par l’État français au nom de la lutte contre le terrorisme, d’une conception de la laïcité qui organise la stigmatisation, et en invoquant la loi sur le séparatisme. Les enseignant·es sont sommé·es de se rallier à un État qui nie le racisme, quand les ministres Jean-Michel Blanquer et Frédérique Vidal considèrent que l’antiracisme et l’approche décoloniale n’ont pas leur place à l’Éducation nationale et dans la recherche. Un boulevard est ouvert au parti fasciste, raciste et antisémite de Marine Le Pen, qui désigne également les ennemi·es de l’intérieur.

Comme l’ensemble des travailleurs et travailleuses de l’éducation, nous ne nous faisons aucune illusion sur les mois et les années à venir. En marche, la destruction du service public d’éducation. En marche, la précarisation des personnels. En marche, la répression des syndicalistes, des pédagogues et de toute pédagogie critique. En marche, l’école du tri social, l’école des inégalités, de l’orientation dès la 5e, de la recherche muselée, du contrôle idéologique de l’Université, du Service national universel. En marche, la rigueur budgétaire, les suppressions de postes, les effectifs pléthoriques. En marche, le greenwashing de l’institution. En marche, la logique du travailler plus tout en gagnant moins…

Après cinq années de blanquérisme, le quotidien des personnels de l’éducation est fait de précarisation, de souffrance, de répression, d’épuisement, d’injonctions contradictoires, de petites et grandes humiliations, de désillusions, de questionnements qui taraudent sur le sens du métier, d’écrasement bureaucratique et hiérarchique.

Pour faire passer leur programme – celui d’une école de l’égalité sociale, d’une école du commun, démocratique et émancipatrice – les travailleurs et les travailleuses de l’éducation, comme l’ensemble de la population, ne peuvent compter que sur elles-mêmes et eux-mêmes.

À notre modeste échelle, dans nos collectifs, nos mouvements pédagogiques, nos syndicats, mais aussi dans nos établissements, nous essayons de construire ce collectif qui est le meilleur des antidotes aux sirènes réactionnaires.

Les combats qui nous attendent au lendemain du 24 avril, nous devrons les mener en portant la solidarité entre les collègues, en accompagnant les personnels qui subissent les injustices de l’institution. Nous continuerons à les mener à travers nos rencontres pédagogiques, nos réunions d’information syndicale, nos stages, nos AG, pour se retrouver, parler, partager nos colères, nos révoltes, nos souffrances, nos joies professionnelles, nos espoirs et pour tenter de construire, sans relâche, cette école que nous voulons émancipatrice. Tout cela, nous le gagnerons par la lutte, pour ne pas nous résigner à l’impuissance.

Aggiornamento histoire-géo, Enseignant·es pour la planète, Icem – Pédagogie Freinet, Iresmo, Questions de classe(s) – N’Autre école, Lettres vives, SVT Égalité

Ressources sur la grossophobie

Catégorie : Non catégorisé
Création : vendredi 4 février 2022 Mis à jour : vendredi 4 février 2022 Publication : vendredi 4 février 2022
Écrit par Super User
Etoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactives

 

- Présentation du livre "« Gros » n'est pas un gros mot. Chroniques d'une discrimination ordinaire", de Daria Marx et Eva Perez-Bello 

- La grossophobie en milieu scolaire, Bordeale, Gras Politique, 21 janvier 2022

- Brochure sur la grossophobie en milieu scolaire du collectif Gras Politique, janvier 2022

Divers

Catégorie : Non catégorisé
Création : mercredi 20 avril 2022 Mis à jour : mercredi 20 avril 2022 Publication : mercredi 20 avril 2022
Écrit par Super User
Etoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactives

Implant cochléaire et normes entendantes

Catégorie : Non catégorisé
Création : mardi 1 février 2022 Mis à jour : mercredi 2 février 2022 Publication : mardi 1 février 2022
Écrit par Super User
Etoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactives

Implant cochléaire et normes entendantes
Pour une pédagogie critique du handicap

Écrit par : Alexandre Magot
Publication initiale : 02/02/2022

Le programme d’enseignement scientifique de première comporte une partie appelée « Son et musique, porteurs d’information » qui peut amener à évoquer le thème des implants cochléaires.

Mais dans la plupart des cas, ces implants ne sont absolument pas mis en perspective et sont décrits, sans nuance, comme une avancée exceptionnelle. C’est d’ailleurs le cas de la seule ressource proposée sur Éduscol, à savoir un article du Figaro.

Pourtant, cette technologie soulève un certain nombre de questions éthiques. Il s’agit d’un sujet complexe, qui fait nettement débat, et une partie de la communauté sourde s’oppose d’ailleurs au recours systématique à ces techniques. Cette partie du programme peut donc être l’occasion d’aborder ce problème, de questionner notre regard sur le handicap, et de discuter des modalités d’inclusion au sein de la société.
Une séance sur ce thème s’inscrit tout à fait à la demande des programmes, dans lesquels est précisé en préambule un des objectifs de l’enseignement scientifique :
« […] l’être humain dispose des outils intellectuels nécessaires pour devenir un acteur conscient et responsable de la relation au monde et de la transformation des sociétés. L’approche scientifique nourrit le jugement critique et rencontre des préoccupations d’ordre éthique. Ainsi, c’est de façon rationnellement éclairée que chacun doit être en mesure de participer à la prise de décisions, individuelles et collectives, locales ou globales. »

1- Les implants cochléaires

Les implants cochléaires sont des dispositifs destinés aux personnes ayant une surdité profonde, soit ayant perdu l’audition des suites d’un traumatisme, soit étant sourdes de naissance. Il ne s’agit pas comme pour un appareil auditif d’amplifier les sons pour une personne malentendante, mais bien de se substituer à l’ensemble de la chaîne de captation/transmission des sons (oreille externe, moyenne et interne) et d’aller générer une stimulation du nerf auditif.

(source image)

Concrètement, la mise en place d’un implant cochléaire consiste à positionner un ensemble de microphones et processeur derrière l’oreille qui capte les sons de l’environnement, les filtre, et les convertis pour les transmettre à un récepteur implanté sous la peau à l’arrière de l’oreille. Le message est alors traduit en impulsions électriques conduites directement à l’intérieur de la cochlée par une électrode, permettant ainsi de stimuler le nerf auditif qui transmettra les informations au cerveau.

Il convient de bien comprendre que les résultats d’une telle opération est bien loin de l’image théorique qu’on peut en avoir. Car si la pose d’un implant permet au cerveau de recevoir des informations sensorielles, il s’agit d’un bruit qu’il faudra apprendre à interpréter. Cela relève d’un apprentissage long, particulièrement fastidieux, aux aboutissements variables mais qui, en aucun cas, ne permet d’entendre de la même manière qu’une personne entendante.

2- Personne handicapée VS personne en situation de handicap. Compensation VS accessibilité

L’exemple de l’implant cochléaire peut donner lieu à une discussion avec les élèves quant aux modalités de l’inclusion et de la place des normes dans notre société. À cette occasion, un documentaire, disponible sur Internet, peut se révéler très utile : Ces sourds qui abandonnent leur implant, réalisé par Stéphane Brasey pour la Radio Télévision Suisse en 2015.

(Cliquer sur l'image pour accéder au film)


Dans la première partie du film (les 20 premières minutes, mais si on dispose de peu de temps, les 12 premières peuvent être suffisantes), on suit en effet le parcours de deux personnes sourdes, dont l’intégration s’est réalisée selon des processus très distincts.

a- Personne « handicapée » et inclusion par la compensation

On peut ainsi voir que l’inclusion de la première personne suivie, Dimitri Rossier, a nécessité d’énormes efforts de sa part : apprendre à lire sur les lèvres, à oraliser, avoir recours à la chirurgie en se faisant implanter et faire des efforts décrits comme insupportables pour essayer d’apprendre à entendre. C’est finalement lui qui a dû porter l’ensemble de l’effort nécessaire à son intégration.
Ce qui est décrit correspond bien au processus d’inclusion d’une personne vue comme « handicapée ». Dans ce contexte, les difficultés vécues sont considérées comme imputables aux caractéristiques intrinsèques aux personnes concernées. Si une personne sourde est handicapée, c’est parce qu’elle n’entend pas, tout comme on considère que les difficultés vécues par une personne paraplégique viennent du fait qu’elle ne puisse pas marcher.

Le cadre profondément normatif de la société, pensé pour les « un·es » (répondant aux normes dominantes, ici les normes entendantes) et excluant de fait tout·es les « autres », n’est alors absolument pas remis en question. L’inclusion des personnes « handicapées » reposera sur des compensations, des aides, des stratégies mises en place pour leur venir en aide et diminuer les difficultés vécues.

Outre que ce modèle d’inclusion est totalement déresponsabilisant pour la société, paternaliste, il est aussi profondément inégalitaire. Car les compensations seront toujours partielles, stigmatisantes, non universelles. Les personnes concernées devront systématiquement en faire la demande, pour, peut-être, y avoir accès (laquelle demande pourra d’ailleurs ne pas être accessible du fait de son coût, que ce soit son coût monétaire, psychologique, en temps disponible, etc.).

b- Personne « en situation de handicap » et inclusion par l’accessibilité

L’inclusion de la seconde personne suivie dans le documentaire, Samuel Schmutz, offre une toute autre perspective. Cette inclusion a été rendue possible au sein de son entreprise grâce à un stage organisé par son employeur à destination de ses collègues, et par le fait que ses collègues aient appris la langue des signes (que ce soit sur le tas ou par des cours). Dans ce cas, ce n’est pas la personne sourde qui a porté le poids de son inclusion, mais c’est le cadre – ici son entreprise –, qui s’est adapté de manière à pouvoir l’inclure.

On comprend alors que les difficultés qu’aurait pu vivre Samuel Schmutz ne seraient finalement pas tant dues à sa surdité qu’à l’inadaptation initiale de l’entreprise. Dans ce contexte, la personne n’est pas perçue comme « handicapée », mais comme potentiellement en « situation de handicap ». C’est le cadre inadapté qui génère les éventuelles difficultés, c’est donc lui qu’il convient de modifier pour les amoindrir. L’inclusion ne repose alors pas sur l’octroi de compensations, mais sur la transformation de la société, pour la rendre accessible. Égalité simple Équité par compensation du handicap Équité par accessibilité de l’environnement

(source image)

3- Le consentement médical et la pertinence des pratiques en question

Le documentaire permet également d’aborder la question de la place hégémonique des normes dans la société, et donc de la pertinence même de ces implants, notamment quand ils sont posés sur des nouveau-né·es. Car qu’on se le dise : les enfants sourd·es n’ayant pas la capacité d’oraliser peuvent cependant bel et bien s’exprimer au travers d’une langue. Une langue, quand bien même elle ne correspond pas à celle relevant des normes dominantes, leur est tout à fait accessible, et avec elle une communauté et une culture : la langue des signes. La question de l’implant cochléaire s’inscrit donc dans un vaste processus de normalisation des corps et des individus. Toute variation aux normes dominantes est rejetée, par la peur notamment, et il convient d’entrer dans le moule, à marche forcée, au moyen d’opérations chirurgicales s’il le faut.

Les propos de Samuel Schmutz (à 16’30’’ et 17’15’’) sont à ce propos assez éloquents :

« On m’a placé cet implant et ça a été un choc, un énorme chamboulement. Jusque-là tout était tranquille, et tout à coup des énormes bruits envahissaient ma tête. C’était terrible. À l’école on me forçait à porter mon implant. Mes parents me forçaient et moi je ne voulais pas. Je l’enlevais, et je l’enlevais encore. Mais à force d’y être contraint, j’ai pris l’habitude de le porter. » […] « J’ai expliqué la situation et bien sûr mes parents ont été déçu·es […] parce que mes parents pensaient que je pourrais parler super bien. Mais dans la réalité c’est trop difficile. Avec la langue des signes, je peux exprimer mon identité, ce que j’ai à l’intérieur. Je préfère. »

L’implant cochléaire ne répond à aucune nécessité d’ordre médical, et bien sûr encore moins à un quelconque désir exprimé par les enfants (ce qui soulève un autre problème, et non des moindres : celui du consentement), mais bien au désir parental d’avoir un·e enfant « normal·e ». C’est évidemment avec la conviction sincère de faire au mieux pour l’enfant que les parents agissent : pour lui faciliter la vie. Mais cette réflexion se fait dans le cadre d’une société qui ne conçoit pas de bonheur, de vie possible, en dehors du sentier balisé par les normes.

3- Deux autres exemples à mettre en parallèle

Deux parallèles peuvent permettre d’éclairer les élèves et d’élargir la discussion.

a- Les élèves « à besoins particuliers »

L’école présente l’avantage d’être un élément connu des élèves, et qui s’inscrit dans leur quotidien direct. En la prenant pour exemple, on quitte une réflexion qui, pour certain·es, peut paraitre théorique. Le cas des élèves dits « à besoins particuliers » s’inscrit en effet dans le cadre d’une inclusion par compensation. Dans ce contexte, il n’est pas question de réfléchir à un cadre scolaire adapté à tou·tes les élèves, quelles que soient leurs capacités, leurs difficultés, leurs particularités. L’école a été pensée (par et) pour les un·es, constituant la norme, et excluant du même coup tou·tes les autres qui sont considéré·es comme ayant des besoins « particuliers ». Pour ces élèves, et à condition d’obtenir un diagnostic et d’en faire la demande, des compensations (PAI, PPS, PAP, PPRE) pourront alors être accordées. Ces dispositifs s’accompagnent cependant de leur charge stigmatisante et relèvent d’un diagnostic que tout le monde n’obtiendra pas.

Une autre stratégie d’école inclusive est de penser le cadre scolaire de manière à ce qu’il puisse accueillir toutes les personnes, dans leur diversité. Il s’agit alors d’une réflexion relevant de l’accessibilité.

b- Le traitement des enfants intersexes

Un autre parallèle peut être fait avec la manière dont sont traité·es les enfants intersexes (voir cet article du site). Les situations présentent en effet de nombreux points communs. Il s’agit là encore de nouveau-né·es à qui sont imposés des protocoles chirurgicaux, alors même qu’elles·ils ne présentent aucun problème de santé, dans le seul but de les faire entrer dans les normes. Rappelons que ces protocoles ont donné lieu à une condamnation de la France en 2016 par le Comité de l’ONU des Droits de l’enfant et le Comité de l’ONU contre la torture. C’est ce parallèle qui avait été souligné lors de la rencontre organisée en 2015 au festival de cinéma de Douarnenez /Gouel ar filmoù consacré à la défense des minorités (et dont on retrouve la transcription sur YouTube).

 

L’acceptation des personnes ne répondant pas aux normes nécessite un travail de fond, qui se réalise à l’échelle de la société entière. C’est tout un rapport au « handicap » qu’il convient de repenser. Il s’agit à la fois d’éviter de construire ces représentations chez les jeunes, et de les déconstruire chez les autres, en commençant par nommer les choses, les visibiliser et en faire des objets critiques.
Et puisque c’est un processus qui demande à être fait sur un temps long, et à l’échelle de la société, l’école est le lieu idéal pour le réaliser. Elle a toute légitimité à se saisir de ces questions et, disons-le, c’est même là explicitement sa mission. Une séance d’enseignement scientifique est donc une occasion à saisir.